Il était une fois, un vieux chêne, mort depuis bien longtemps déjà, dont ne subsistait que le tronc écorché le long d’un chemin forestier, au coeur d‘une haie bocagère.
Ce vieux tronc, c’est moi.
Je me se sentais bien seul, inutile, oublié, incompris …
Je ne me consolais pas de ne plus vivre au rythme des saisons, de ne plus sentir la sève printanière me parcourir pour faire naître bourgeons et feuilles, de ne plus abriter les nids des oiseaux et d'accueillir leurs chants, de ne plus sentir le vent dans mon feuillage … Bien malheureux aussi, quand viennent les journées d'automne, de ne plus distribuer les glands qui faisaient le bonheur des écureuils …
Pourquoi a-t-il fallu, qu’un champignon vienne m’infester et me ronger de l’intérieur.
Malade, à bout de forces, les bucherons ont fini par me juger dangereux. Moi, dangereux ? c'est une blague !
Vint alors ce jour de novembre, où dans un bruit infernal qui effraya les animaux voisins, ils ont activé leurs engins macabres pour supprimer méthodiquement mon squelette qui avait pourtant abriter tant de vie.
Puis vint le coup fatal ! J’ai lutté … crié …vacillé … et me suis effondré sur le sol dans un dernier craquement de douleur. Le choc fût rude.
Et je restais là, seul, abandonné au milieu de la haie vivante.
Au fil des mois la nature se renouvelait.
Au Printemps, les jacinthes sauvages de couleurs délicates s’installaient autour de moi pour le plaisir des passants,
L’aubépine se couvrait de ses délicates fleurs blanches qui exhalaient leurs parfums subtils,
Puis les muriers, de leurs épines acérées défendaient leurs fruits mûrs alors que certains se risquaient à la cueillette pour leurs confitures,
Des champignons -pas ceux qui ont eu raison de ma santé-, pointaient leur nez à travers les premières feuilles mortes et les bruines d’automne sur la terre encore chaude,
Le houx se couvrait de ses fruits et ces belles boules rouges allaient décorer les maisons du village pour Noël.
Quant à moi, je ne pouvais plus proposer mes propres fruits. Les écureuils ont dû aller s’approvisionner ailleurs.
Je ne sers donc plus à rien et ne suis qu’un vieux tronc, couché à même le sol.
Un jour pourtant deux individus, munis de 2 sceaux – un rouge et blanc- et de deux pinceaux s’approchent.
Je leur demande « mais que venez-vous faire si près de moi ». Évidemment ils ne m’entendent ou ne me comprennent pas !
Alors rapidement me voilà maquiller avec un trait rouge et un trait blanc, l'un au-dessus de l'autre, le blanc au-dessus du rouge.
Je ne sais pas ce qu’il leur a pris pour m’imposer ces 2 traits. Ils sont repartis, indifférents à mon questionnement.
Mais ce que sais, c’est que depuis, de nombreux randonneurs passent près de moi. Ils parlent beaucoup, je ne comprends pas tout.
Oh, certes, je n’ai droit qu'à un coup d’œil furtif -surtout de celui qui est le premier du groupe-mais ça me fait plaisir : je dois servir encore à quelque chose. Je reste un point de répère sur le chemin.
D'ailleurs sur les cartes vous me trouverez indiqué : "l'Arbre à balises"
Et surtout, si un jour vous passez par là et que vous êtes fatigués, n’hésitez pas à vous assoir : je suis encore là pour longtemps !
